1948

LA GRANDE GRÈVE DES MINEURS DE 1948

Conférence de Mineurs du Monde 21 / 01 / 16 LENS

Moment de grande émotion dans l’amphi 25 de la Faculté Jean Perrin de LENS en ce jeudi 21 janvier 2016 : l’Université Populaire reçoit Norbert GILDEZ, l’un des derniers Mineurs punis de 1948, venu avec Dominique SIMONNOT, journaliste au Canard Enchaîné, autour de l’ouvrage ‘’Plus noir dans la nuit’’ qui recueille les témoignages des derniers acteurs de l’époque et qui relate leur combat pour être réhabilités, combat qui n’est toujours pas terminé en 2016. Dans le public très nombreux (plus de cent personnes), il y a des responsables syndicaux de la CGT et de FO mais aussi quelques enfants des Mineurs qui ont dirigé la lutte en 1948. A la fin des exposés de Christian MORZEWSKI qui a rappelé le contexte de l’époque, de Dominique SIMONNOT qui a expliqué pourquoi elle s’est engagée dans ce combat pour la justice et de Norbert GILDEZ qui a rappelé les brimades subies par les meneurs dont il faisait partie et les résultats judiciaires obtenus ces dernières années, quelques échanges un peu chauds FO - CGT ont montré aux participants que la plaie n’est toujours pas refermée soixante-dix ans après !

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Christian MORZEWSKI, Président de l’UP2M,
présente le contexte de l’époque. Photo GT
 ‘’Plus noir dans la nuit’’, l’ouvrage de
Dominique SIMONNOT. Photo GT
Dominique SIMONNOT et Norbert GILDEZ. Photo GT
 
Un public fidèle et attentif mais il y a eu quelques questions chaudes
aux membres de la CGT lors du débat en séance plénière. Photo GT
 Raymond FRACKOWIAK, Secrétaire Général CGT des Mineurs du Pas-de-Calais,
justifie la révolte de 1948. A sa droite, Pierre REBOUILLAT dont le papa mineur
à la fosse 6 de MAZINGARBE et résistant a été licencié et dégradé. Photo GT
Julien LEHUT, ancien Mineur, apostrophe les Responsables de la CGT sur les
évènements de 1948 qui ont fait beaucoup de mal à son père. Photo GT

Rappels historiques : la période 1944-1947

1) La Libération du Bassin Minier

25 août 1944, la Bataille de Normandie vient de se terminer dans le chaudron de FALAISE, tombeau de la VIIème Armée allemande, les Blindés de la 2ème DB du Général LECLERC libèrent PARIS. Apprenant la nouvelle, les Mineurs déclenchent une grève dans tout le Bassin Minier du Nord/Pas-de-Calais. Les armées alliées approchent à grande vitesse ; dans leur fuite vers le Nord, les Nazis se rendent coupables de quelques massacres dans les villages. On voit les libérateurs pour la première fois le 1er septembre dans la région. Mis à part quelques accrochages avec des Résistants qui veulent retarder le repli massif des Allemands, il n’y a pas de gros combats. C’en est fini des cinquante-et-un mois d’occupation, c’en est fini des privations, du marché noir, des couvre-feux, des brimades, des arrestations et des déportations, la liberté est revenue et le Bassin Minier va revivre ! C’est aussi l’heure de régler les comptes… De nombreux collaborateurs sont arrêtés, en particulier les cadres des Compagnies Minières qui ont ̎sympathisé ̎avec l’Occupant.

2) La prénationalisation des Compagnies minières

Les Directeurs de toutes les fosses sont remplacés par des administrateurs provisoires. Le 13 décembre 1944, le Général DE GAULLE signe une première ordonnance dans laquelle on parle de la Société des Houillères Nationales qui, dès le 1er janvier 1945, commencera à gérer les Mines du Nord/Pas-de-Calais mais aussi celles du territoire entier à l’exception de celles de la Lorraine où la bataille fait encore rage (fin de la Bataille des Ardennes, FORBACH et les puits avoisinants ne seront libérés que le 19 mars 1945). Les 18 Compagnies du Bassin sont remplacées par 6 Groupes d’exploitation : AUCHEL-BRUAY, BULLY-NOEUX, LENS-LIÉVIN, HÉNIN-LIÉTARD, DOUAI-ANICHE et VALENCIENNES-ANZIN.

Forts de leur rôle dans la Résistance, les Communistes revendiquent des postes importants dans les conseils d’administration des Houillères. Dès la Libération, ils ont repris le contrôle de la CGT et la plupart des Délégués-Mineurs qui traitent d’égal à égal avec les Directeurs des fosses sortent des rangs du PCF : rien ne se décide sans eux. Comme le charbon est la priorité n°1 de leur chef Maurice THOREZ mais aussi du premier Gouvernement de GAULLE qui comporte des Ministres communistes, les Délégués ont un rôle fondamental dans les fosses : il faut impliquer les Mineurs pour retrouver les productions d’avant-guerre :

  • 1938 : la France produit 48 millions de t de charbon et le Nord/Pas-de-Calais 30 millions de t ;

  • 1945 : ce n’est plus que 30 millions de t pour tout le pays et 18 millions de t pour le bassin nordiste.

Pour THOREZ, le Nord/Pas-de-Calais doit produire 100.000 t/jour et les autres régions 60.000 t/jour, c’est le début de la Bataille du Charbon… Le combustible est indispensable pour faire fonctionner les usines et rebâtir dans les zones sinistrées par les bombardements alliés (Normandie, Picardie, Nord/Pas-de-Calais).

3) La Bataille du Charbon, la nationalisation, le Statut du Mineur

Ce sont donc les Ministres communistes et la CGT qui poussent les Mineurs à la tâche. Dès que l’objectif journalier est atteint pour une fosse, le drapeau tricolore est hissé sur le chevalement et les meilleurs abatteurs sont récompensés (vélo, demi-cochon). Durant cette époque où il faut produire à tout prix, la sécurité est mise au second rang et de nombreux accidents dont certains mortels ont lieu un peu partout :

  • 9 morts au 3 de LENS à LIÉVIN le 30 janvier 1945 (éboulement),

  • 9 morts au 15 de LENS à LOOS-EN-GOHELLE le 21 décembre 1945 (éboulement),

  • 13 morts au 1 d’OSTRICOURT à OIGNIES le 28 mars 1946 (coup de grisou).

Malgré un outillage défaillant, l’objectif des 100.000 t/jour est vite dépassé dès le milieu de l’année 1945 et la production de 1938 dépassée. Cependant, les Mineurs ne sont pas les seuls à se surpasser ; Benoît FRANCHON, au nom de la CGT, appelle les travailleurs de toutes les usines à faire des heures supplémentaires et notamment le dimanche ; c’est la révolte du prolétariat par le travail. "Produire, c’est aujourd’hui la forme la plus élevée du devoir de classe, du devoir des Français ! " a hurlé Maurice THOREZ, ancien Mineur devenu ensuite Ministre d’État communiste, à WAZIERS le 21 juillet 1945.

C’est encore le temps de l’union sacrée entre le Président du Conseil, Charles DE GAULLE, et le chef du premier parti de France. Mais bientôt DE GAULLE, las de la IVème République qui est le régime des partis qui font et défont des alliances aussi fragiles qu’éphémères, se retirera le 26 janvier 1946 et ce sera la valse des Gouvernements :

  • du 26 janvier au 24 juin 1946 : Félix GOUIN (SFIO) aura le temps de nationaliser l’électricité, le gaz et les Bassins houillers de Lorraine (la Nationalisation du charbon est terminée le 5 mai) ; le 14 juin, Auguste LECOEUR, Sous-Secrétaire d’Etat communiste au Charbon, promulgue le Statut du Mineur. Le Mineur est alors promu ̎premier ouvrier de France ̎.

  • du 24 juin au 16 décembre 1946 : Georges BIDAULT (MRP) créera le statut de la Fonction Publique.

  • du 16 décembre 1946 au 16 janvier 1947 : Léon BLUM (SFIO) ne restera qu’un mois.

  • du 16 janvier 1947 au 21 octobre 1947 : Paul RAMADIER (SFIO) est obligé de prendre 5 Ministres communistes (le PCF vient d’obtenir 28,8 % des suffrages aux Législatives du 10 novembre 1946). Fort de ce bon score, THOREZ exigeait la place de Président du Conseil mais il ne sera que Ministre d’État ; avec lui, François BILLOUX est Ministre de la Défense, Charles TILLON est Ministre de la Reconstruction et de l’Urbanisme, Ambroise CROIZAT est Ministre du Travail et de la Sécurité Sociale, Georges MARRANS est Ministre de la Santé Publique et de la Population mais Marcel PAUL en poste à la production industrielle depuis le 21 janvier 1945 n’est pas repris. Ce Gouvernement tombera le 24 novembre 1947 et c’est Robert SCHUMAN qui sera le nouveau Président du Conseil.

Le statut du Mineur de 1946. Photo GT
 
Auguste LECEUR en 1946. Photo Le Lensois Normand
 

4) Le plan Marshall, la révocation des Ministres communistes, la scission de la CGT

Dans les Mines, les Directeurs salariés soutenus par les Gouvernements successifs qui supportent de moins en moins de voir l’appareil de production contaminé par l’appareil communiste ont repris du poil de la bête ; dans les fosses, les conflits se multiplient avec les Délégués-Mineurs pour diverses raisons avancées par ceux-ci (sécurité négligée, matériel vétuste pour les objectifs fixés, salaires insuffisants,…). L’inflation galopante (plus de 30%) n’arrange rien, les salaires augmentent moins vite que les prix des denrées les plus indispensables, on se croirait revenu en temps de guerre. La colère commence à gronder dans les corons…

Toutes ces difficultés financières dues principalement aux coûts faramineux de la reconstruction et de la modernisation de l’industrie diminuent la crédibilité des hommes politiques au pouvoir (la majorité est socialiste) ; ceux-ci ont sans doute un peu trop promis à la classe ouvrière qui est déçue, d’où une atmosphère de crise perpétuelle et la valse des Gouvernements successifs. Entre les Ministres communistes et les Ministres socialistes majoritaires (mais aussi au sein de la CGT), le torchon commence à brûler. Les premiers critiquent ouvertement les décisions du Gouvernement auquel ils appartiennent. Paul RAMADIER, Président du Conseil, exclut les cinq ministres communistes le 5 mai 1946 sans état d’âme. La CGT, sous l’impulsion de Léon DELFOSSE (Mineur devenu Directeur-Adjoint communiste de Charbonnages de France) entre en guerre avec le Gouvernement, elle va user de tout son poids pour contrarier toutes les décisions de celui-ci (grèves, défilés, campagnes de dénigrement dans ̎la Tribune ̎, …).

Les Américains qui ont peur que l’Europe de l’Ouest (celle qui n’est pas occupée par les Russes) sombre et amène au pouvoir des régimes à la solde de Moscou proposent leur aide et on commence de plus en plus à entendre parler de ̎Plan Marshall ̎. George MARSHALL, ancien chef d’état-major de l’armée américaine en Europe devenu Secrétaire d’État, présente en effet un programme d’aide à 16 pays sortis plus ou moins meurtris du second conflit mondial : le Royaume Uni, l’Eire, la France, le Portugal, la Belgique, les Pays Bas, le Luxembourg, l’Allemagne, le Danemark, la Norvège, la Suède, la Suisse, l’Autriche, l’Italie, la Grèce et la Turquie. L’Union Soviétique a aussi été contactée mais elle a bien sûr refusé l’aide…

En quoi consiste le Plan Marshall ? Ce sont des prêts qui sont consentis aux États et non des dons. Les aides doivent servir à acheter du matériel exclusivement américain à un prix intéressant ; l’État le revend plus cher aux entreprises de son territoire en gardant les frais de douanes, les bénéfices doivent obligatoirement être réinvestis pour la reconstruction du pays et la modernisation de l’appareil de production. Belles intentions, tout le monde devrait être gagnant ! C’est sans compter sur les 9 PC européens (URSS, Pologne, Tchécoslovaquie, Hongrie, Roumanie, Bulgarie, Yougoslavie, France, Italie) qui, réunis au sein du Kominform du 22 au 27 septembre 1947 en Pologne, donnent comme mission au PCF et au PCI de tout faire pour saboter la mise en œuvre du Plan Marshall, l’URSS craignant la ‘’vassalisation’’ de toute l’économie de l’Europe de l’Ouest par les milieux d’affaires américains.

En France, l’inflation est alors de 50 %, les prix montent en flèche. Pour les Mineurs, c’est insupportable !

La viande manque, le ravitaillement du Bassin Minier en denrées essentielles est mal assuré, la situation est explosive. La mise à l’écart de Léon DELFOSSE, Directeur-Adjoint CGT des Charbonnages de France, est l’étincelle qui met le feu aux poudres. Le 15 novembre 1947, l’agitation commence dans les fosses d’OIGNIES-OSTRICOURT (fief de Léon DELFOSSE), la CGT appelle à la grève illimitée dans tous les Charbonnages et 90000 Mineurs cessent le travail, celle-ci s’étend à la SNCF paralysée par le débrayage des cheminots. Cette crise fait tomber le Gouvernement RAMADIER. Devenu Président du Conseil le 24 novembre 1947, Robert SCHUMAN entre en scène et accorde quelques compensations aux Mineurs (prime de 1500 F) dont se satisfait la CFTC mais pas la CGT. Tous les syndicats minoritaires sauf la CGT majoritaire appellent à la reprise du travail mais au sein de celle-ci, il n’y a pas l’unanimité ; certains pensent qu’on ne peut pas toujours faire la grève (c’est la misère chez les militants…) et que l’aide américaine serait peut-être la bienvenue mais ils sont minoritaires (16 %). On est au début de la Guerre froide entre les deux blocs (USA et URSS), certains ont peur de l’invasion de l’Europe de l’Ouest par les Russes.

Les deux chefs de la révolte intra-syndicale à la CGT sont Léon JOUHAUX et André BERGERON qui veulent se libérer du joug de MOSCOU ; encouragés par les milieux socialistes et par la CIA qui, par l’intermédiaire d’Irwin BROWN, leur apporte un soutien financier, les deux compères quittent la centrale et créent Force Ouvrière le 19 décembre 1947. Le Gouvernement, à son tour, apporte une aide au nouveau syndicat avec lequel il pense pouvoir discuter plus sereinement de la situation. Est-ce normal ? Non, pensent les autres syndicats. Dans les administrations minières, les représentants FO des Mineurs élus quelque temps avant sous l’étiquette CGT siègent désormais sous l’étiquette FO sans être passés par les urnes, ce qui provoque des disputes incessantes et des menaces, des lynchages seront même organisés par le syndicat majoritaire.

NB : Le Plan Marshall sera mis en œuvre entre 1948 et 1952, il permettra à la France de se relever, quoi qu’on en dise. Les productions agricole et industrielle augmenteront respectivement de 10 % et de 40 %. Pour certains économistes, la reprise aurait pu se faire sans l’aide des USA, le processus aurait été plus long mais il aurait évité la mise sous tutelle économique et culturelle des pays libérés par l’armée américaine. L’aide totale a été de 13 milliards de dollars soit 1,2 % du PNB des États-Unis.

La Grève de 1948

1) Les Décrets Lacoste

Le travail reprend à la mi-décembre 1947 mais la CGT demande aux Mineurs déçus de ne plus laisser leur santé au travail. À quoi bon se tuer à la tâche si c’est pour ne pas avoir un niveau de vie supérieur ? Au cours du second semestre 1947, les prix des denrées alimentaires de base ont augmenté de 43% et les salaires des Mineurs de 11%. Commence dès lors une période au cours de laquelle le rendement au fond se met à diminuer alors que l’absentéisme atteint des records. C’en est trop pour les Charbonnages qui estiment qu’il y a désormais trop de personnels non productifs au fond et chez les administratifs. En 1946, en pleine bataille du charbon, beaucoup d’ouvriers non qualifiés ont été embauchés, il faudrait dès lors ̎un bon dégraissage ̎ et pourquoi ne pas commencer par les absentéistes chroniques ? Lors des six premiers mois de 1948, l’agitation est permanente dans tous les bassins charbonniers car il se dit qu’un certain nombre de décrets contre les Mineurs sont en préparation. Le 19 avril 1948, à la fosse 4/11 de SALLAUMINES, un coup de grisou cause la mort de 11 Mineurs au fond et de 3 trieuses au jour car le souffle est remonté au jour par le puits n°4. L’été vient à point nommé pour le Gouvernement SCHUMAN et le mouvement de protestation qui s’était étendu aux cheminots, aux salariés de la Fonction Publique, aux banques et au secteur automobile (Citroën, Renault) s’essouffle un peu. Dès la parution des fameux ̎Décrets Lacoste ̎ (du nom du Ministre de l’Industrie Robert LACOSTE)  en août 1948, c’est-à-dire pendant les congés d’été, la corporation minière est sous le choc :

  • mise à pied immédiate de tous les absentéistes,

  • reprise en charge des accidents de travail et des maladies professionnelles par Charbonnages de France et non plus par les SSM gérées par des Conseils d’Administration où siègent des Mineurs élus,

  • paiement de tous les Mineurs à la tâche (quid de ceux qui ne sont pas abatteurs ?) et fin des salaires conventionnels (les intéressés comprennent qu’il y aura une baisse générale des rémunération…),

  • réduction de 10% du personnel administratif.

La CGT y voit là une atteinte aux droits obtenus avec le Statut du Mineur et appelle à l’action ; la CFTC et FO demandent au Gouvernement d’atténuer un peu ces mesures, celui-ci les adoucit quelque peu mais c’est trop tard, le mal est fait… Les Mineurs se sentent humiliés : on leur a demandé de redresser la France après la Libération et ils l’ont fait en y sacrifiant pour beaucoup leur santé mais pour quels résultats ? Charbonnages de France semble devenir un employeur bien pire que les Compagnies Minières de l’avant-guerre ! Pour ce qui est des entorses à leur statut, les Mineurs s’estiment trahis et sont prêts à tout pour retrouver leurs droits. Le 10 septembre 1948, un incendie se déclare à la fosse 7 d’AVION et fait exploser une poche de grisou, 7 hommes sont tués. Catastrophes à répétition depuis la Libération, statut remis en cause, licenciements, baisse des salaires, brimades et amendes continuelles, c’en est trop !

Les Mineurs CGT sont bien sûr au premier rang des contestataires et leur centrale commence à organiser la lutte qui d’étend aux autres secteurs de salariés (cheminots, électriciens, gaziers, Fonction Publique, RATP, métallurgistes, …). La situation est explosive et tout le pays pourrait bientôt être paralysé. Le Gouvernement SCHUMAN tombe à son tour le 7 septembre 1948 et le nouveau Président du Conseil est Henri QUEUILLE (Radical socialiste), le socialiste Jules MOCH qui deviendra bientôt célèbre reste Ministre de l’Intérieur.

2) C’est l’état de guerre dans tous les bassins charbonniers

Le 4 octobre 1948, le personnel de CDF est consulté par référendum et la grève est décidée à 89 %. 340000 Mineurs stoppent le travail. Plus une tonne de charbon ne remonte des puits, le pays est paralysé. Le Gouvernement menace d’envoyer les CRS si la liberté de travail n’est pas respectée. Le 19 octobre, les CRS investissent les camps où sont logés les Nord-Africains travaillant dans les fosses de Lorraine ; ils saccagent les baraquements et conduisent les ouvriers de force à la mine. Des opérations similaires sont menées dans plusieurs bassins. Les Mineurs répliquent en se barricadant dans toutes les fosses, ils dorment sur place et sont ravitaillés par l’extérieur. Les bagarres avec les forces de l’ordre se multiplient et il y a de très nombreuses arrestations.

Les Mineurs se barricadent dans les fosses. Photo Léon Leponce

Le 22 octobre 1948 à BÉTHUNE, à l’initiative de la CGT et du PCF, 6000 grévistes attaquent la sous-préfecture pour faire libérer leurs camarades emprisonnés. Les CRS chargent… Aux grenades lacrymogènes répondent des pierres et des boulons, il y a de nombreux blessés dans les deux camps. On saura le lendemain que les organisateurs de l’attaque savaient que les Mineurs emprisonnés avaient tous été libérés le matin même mais ils ont laissé faire, la presse ̎capitaliste ̎ ne les a pas ratés le lendemain…

22 octobre 1948 : ça chauffe devant la sous-préfecture de BÉTHUNE. Photo Le Monde

Devant tant d’agitations, Jules MOCH, Ministre de l’Intérieur, soutenu par tous ses collègues du Gouvernement, envoie la troupe pour libérer les puits : 60000 hommes envahissent les corons. La presse non communiste soutient la répression. Ras le bol des Staliniens qui paralysent le pays ! Le 21 octobre 1948, le journal conservateur ̎L’Époque ̎ titre, sous la plume de Frédéric VAUTHIER : ̎M. QUEUILLE, M. MOCH : bombardez les quartiers généraux ! Atomisez-les !  ̎. C’est la guerre !

La troupe arrive dans les corons. Image INA
 

Des coups de feu éclatent lors des manifestations et il y a des morts :

  • 2 morts (les Mineurs BARBIER et GOÏO) et 30 blessés au puits Cambefort de FIRMINY dans la Loire,

  • 1 mort à ALÈS (le Mineur CHAPTAL),

  • 1 mort à MERLEBACH (le Mineur JANSEK roué de coups par les CRS).

Après les incidents de FIRMINY, François MITTERRAND, Secrétaire d’État à la Présidence du Conseil, croit bon d’affirmer que ce sont les grévistes qui ont tiré les premiers, ce que 24 correspondants de presse réfutent dans une déclaration commune.

Dans le Nord/Pas-de-Calais, il y a des incidents dans toutes les fosses. Jules GRARE écrit dans son ouvrage ‘’Ma vie à Liévin’’ (p 137) : ̎LIÉVIN était pour ainsi dire assiégé par la Police et la troupe. Nous avons connu le couvre-feu le soir tout comme à la fin de la guerre. Les patrouilles de soldats se succédaient sans arrêt dans les rues. La grève avait atteint son point le plus dur mais, en même temps, les briseurs de grève avaient décidé d’entrer en action et ce qui devait arriver arriva. Ils avaient repris du poil de la bête, comme on dit, et donc un soir, ils se présentèrent à la fosse, espérant reprendre le travail et ainsi entraîner d’autres Mineurs avec eux. La riposte fut immédiate : ils furent renvoyés chez eux, tout simplement pour ceux qui n’avaient pas insisté ; les autres, par contre, reçurent quelques coups de pied dans le cul bien mérités ! Ils s’étaient enfuis mais il était clair qu’ils allaient remettre ça et venir plus nombreux.

Jules GRARE continue (p 139): ̎Mais un jour, la grève se durcit encore. Certains anti-grévistes n’hésitèrent pas à se faire accompagner par des soldats et CRS. Les affrontements furent rudes et LIÉVIN connut des journées chaudes. A la fosse 1, nous avions une autopompe comme moyen de défense et pour doucher les anti-grévistes. A la fosse 5 de CALONNE-LIÉVIN, ce fut différent : les grévistes avaient pris position sur le pont qui se trouvait à côté de la fosse. Chaque fois que les CRS chargeaient, ils étaient accueillis par une pluie de cailloux et de boulons de toutes natures lancés par les grévistes cachés derrière un wagon qui avait été amené sur le pont pour servir de rempart et d’abri face aux assauts des CRS. La lutte fit rage. A un certain moment, le curé du quartier qui avait pris parti pour les grévistes n’avait pas hésité à se dresser contre les CRS qui menaçaient de tirer. À la suite des assauts répétés des gardes mobiles, le wagon fut balancé par-dessus le pont et atterrit au milieu de la route dans un fracas de tonnerre. Les femmes les plus acharnées étaient à la lutte tout comme leurs maris mineurs. Mais devant ce déploiement de force, que pouvions nous faire ? Au 3 de LENS, le mur d’entrée fut enfoncé par un char et naturellement il ne resta plus aux camarades qu’à se sauver devant les troupes de soldats. Nous avions perdu la bataille, il fallait se rendre à l’évidence. ̎

Boulons et pierres contre grenades lacrymogènes. Image INA

3) La vie dans les cités minières pendant la grève

Entre les échauffourées avec les CRS et les soldats, les grévistes et leurs ̎supporters ̎organisent des activités ludiques à proximité ou sur les carreaux des fosses  (jeux divers, bals, spectacles, …) mais malgré cette apparente solidarité, l’espoir d’une sortie positive du conflit s’amenuise. L’argent manque cruellement et les ménages acceptent que leurs enfants (environ 20000) partent pour être hébergés dans des familles des communes de la ̎ceinture rouge ̎ parisienne. Des collectes sont organisées sur tout le territoire pour soutenir le mouvement des Mineurs et des aides viennent même des pays de l’Est sous influence soviétique, 300 millions sont ainsi récoltés mais c’est insuffisant… Les paysans locaux apportent de la nourriture aux grévistes et on organise des soupes populaires ; dans les ports, les dockers refusent de décharger le charbon importé. On ne peut tenir longtemps ainsi, surtout dans un tel climat de répression créé par les forces de l’ordre qui ont reçu l’ordre de tirer sur la foule en cas de danger. De rage, des grévistes s’en prennent aux ingénieurs et aux porions qui doivent s’armer ou demander l’aide des CRS, ce qui n’arrange rien. Dans l’ouvrage ‘’Mineur de fond’’ de Augustin VISEUX (Mineur devenu ingénieur ; en 1948, il dirige la fosse 15 de LOOS-EN-GOHELLE), on peut lire :

̎À la fosse 15, une tranchée de deux mètres de profondeur, longue d’une trentaine de mètres, fut creusée et des stocks de projectiles accumulés. Un mannequin aux mains rougies symbolisant Jules MOCH était pendu à un mât au sommet duquel flottait le drapeau du Parti Communiste. « Assassin ! » lisait-on sur la pancarte accrochée à sa poitrine. Mon fils Jean-Marie qui avait 5 ans, avait demandé en revenant de l’école qui était ce Monsieur. «C’est ton père  lui répondit un homme. Mon fils revint affolé à la maison, totalement perdu. ̎

4) La fin de l’espoir

Sentant que le mouvement s’essouffle, le Gouvernement demande à l’armée d’entreprendre la reconquête progressive des puits. A partir de la mi-novembre, le nombre de grévistes diminue chaque jour. Devant ce constat accablant, le Comité National de Grève ordonne la reprise générale du travail pour le 29 novembre. La ̎révolution ̎ aura duré 56 jours… Les Mineurs sont écœurés, leurs espoirs se sont envolés, l’heure de la répression et des règlements de compte a sonné et certains d’entre eux vont le payer très cher car on ne leur fera pas de cadeaux ! Pour les militants communistes, l’histoire se répète et ce sont toujours les mêmes qui paient un lourd tribut :

  • En juin 1941, les SS étaient venus mater la révolte qui avait commencé à la fosse 7 de DOURGES, dite du ‘’Dahomey’’, il y eut 100000 grévistes dans le Nord/Pas-de-Calais ; 325 militants communistes furent arrêtés, 94 furent fusillés, 231 furent envoyés dans les camps et 126 n’en revinrent pas.

  • En novembre 1948, ce sont les CRS qui font le même travail contre les militants communistes d’où les inscriptions ̎CRS = SS ̎ sur les murs des fosses ; 3000 Mineurs sont arrêtés, 1500 sont emprisonnés, 1342 sont condamnés (713 dans le Pas-de-Calais), 3000 sont licenciés dont 117 Délégués syndicaux.

4) Jules MOCH, l’artisan de la répression

Né à Paris en 1893 mais d’origine alsacienne, Jules MOCH a été un personnage important de la vie politique française pendant près de quarante ans. Polytechnicien et ingénieur de la marine, il est élu député de la Drôme en 1928 pour la première fois, il le sera une dernière fois en 1962 dans l'Hérault. Homme de gauche, il prend dès le départ de sa vie politique ses distances avec les Communistes.

Avant le second conflit mondial, il est Sous-Secrétaire d’État du Front Populaire en 1936 puis Ministre des Transports et des Travaux Publics en 1938, il usera de son influence pour aider les Républicains espagnols. La même année, il s’affiche contre les accords de MUNICH et au moment de la défaite, il ne vote pas les pleins pouvoirs au Maréchal PÉTAIN. Il est arrêté en septembre 1940 et incarcéré dans l'Indre en compagnie de Vincent AURIOL (ex-Ministre) et de Max DORMOY (Sénateur). Libéré quelques mois après, il devient Résistant et crée le "Réseau 1793" dans l'Aude et en Ardèche en Zone Libre. Il rejoint LONDRES en 1942 mais il n’aime pas le Général DE GAULLE. Il s'engage alors dans les forces navales de la France Libre en 1943 et participe au débarquement de Provence en août 1944. C’est donc tout auréolé de tous ces faits d’armes héroïques qu’il reprend une carrière politique dès la fin du conflit et il redevient tout à fait logiquement Ministre des Travaux Publics et des Transports en 1945 puis Ministre de l'Intérieur en 1947. En 1948, il use de son pouvoir pour aider le jeune état d’Israël à se constituer. C’est aussi à cette époque qu’a lieu la grande grève des Mineurs suite aux décrets promulgués par son collègue de l’Industrie, Robert LACOSTE, qui lui demande d’intervenir pour ̎mater ̎ la dangereuse révolte dans tous les Bassins Miniers.

Jules MOCH entre alors dans un conflit très dur avec la très puissante FNSS (Fédération nationale du Sous-Sol), la plus importante fédération de la CGT, et il mettra met tout en œuvre pour la réduire à néant. C’est lui qui crée les CRS (Compagnies Républicaines de Sécurité) qu’il associe dans la répression aux troupes d’occupation venues d’Allemagne. Jusqu’en 1950, il travaillera pour la reconstruction des voies de transport (routes, ponts, canaux, chemin de fer). Il deviendra ensuite Ministre de l’Armée chargé de la modernisation de celle-ci en vue d’une entrée dans l’OTAN. A partir de 1951, il n’occupe plus de fonctions ministérielles mais reste un Elu de gauche avec des missions diverses. Il s’oppose à François MITTERRAND et au Programme Commun et quitte le PS en 1975. Il décèdera en 1985 à 92 ans.

Le nom de Jules MOCH résonne à jamais comme celui du diable dans toutes les conservations des Mineurs qui ont vécu les évènements de 1948 mais autant lui que Robert LACOSTE assumeront jusqu’au bout de leur vie la responsabilité de la répression qu’ils estimeront tout à fait justifiée : il fallait réduire les coûts de l’extraction du charbon à cause de la concurrence étrangère et de l’arrivée prochaine du pétrole en grande quantité et montrer aux Mineurs que, désormais, le marché de l’énergie allait devenir mondialisé.

Jules MOCH, Ministre de l’Intérieur en 1948. Image INA
CRS = SS, le slogan date de 1948… et non de 1968 ! Image INA

4) Le bilan de la grève pour les Mineurs

- Les Mineurs n’ont pas obtenu le retrait des Décrets Lacoste.

- 6 Mineurs ont été tués dans les affrontements avec les forces de l’ordre, des dizaines ont été blessés.

- 3000 Mineurs ont été arrêtés, la plupart ont perdu leur emploi, leur maison et leurs avantages ; ils

ont ainsi longtemps vécu dans la plus grande des misères, sans revenus si ce n’est quelques aides

familiales, dans des blockhaus abandonnés, dans des cabanes, sans eau, sans électricité, sans chauffage.

- Impossible pour ceux qui ont été licenciés de retrouver un emploi dans une entreprise du Bassin Minier.

Les gardes des Mines visitaient les usines (beaucoup fournissaient du matériel à CDF) afin de contrôler

si elles n’ont pas embauché des exclus des fosses ; si c’était le cas, CDF ne leur commandait plus rien.

- Pour retrouver du travail, beaucoup de Mineurs licenciés ont dû changer de région.

- Des amendes très lourdes ont été infligées aux condamnés qui auront bien du mal à les payer

(le journal communiste Liberté paiera la moitié des sommes dues).

- Des dizaines de Mineurs anciens Résistants qui ont terminé la guerre avec un grade dans l’armée ou

dans la Résistance ont été dégradés ; certains, honteux, ne l’ont jamais avoué à leur famille.

  • Les noms des Mineurs licenciés ont été inscrits au rouge sur les fichiers des Renseignements Généraux, il leur a donc été impossible à vie de s’inscrire à un concours de la Fonction Publique. Cette punition a été étendue à leurs enfants (Pierre REBOUILLAT, fils du Délégué CGT de la fosse 6 de MAZINGARBE licencié en 1948, n’a pas pu devenir gendarme vingt ans après car son père décédé avait été fiché).

- La CGT, syndicat majoritaire dans les Mines, sort affaiblie du conflit car beaucoup de ses cadres ont

été licenciés ou écartés des responsabilités.

- A l’issue de cette grève très dure, le Mineur est tombé de son piédestal de ̎premier ouvrier de France ̎

à peine deux ans après l’obtention d’un statut inespéré. Diana COOPER-RICHET dans son ouvrage ̎Le

peuple de la nuit ̎pense que ̎la répression féroce pour remettre les Mineurs au travail est sans doute le signe avant-coureur de leur déclin proche. En quelques années, ceux-ci vont passer du rôle de «premier ouvrier de France» à celui de corporation appelée à disparaître, ce qui est difficile à admettre pour une génération d’hommes nés après le premier conflit mondial, marqués par le second et appelés à abandonner leur métier après 1963. ̎

  • La nécessité absolue de rénover les appareils de production du charbon et du fer préconisée dans le plan MONNET (1946-1950) puis dans le plan SCHUMAN qui aboutira en 1951 à la création de la CECA (Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier : France, Allemagne, Italie, Belgique, Pays Bas et Luxembourg) va entraîner la concentration des productions sur des sièges rénovés et performants. Après la Bataille du Charbon, il va désormais falloir à partir de 1950 gagner celle de la productivité.

La lutte des Mineurs condamnés de 1948 pour leur réhabilitation

Depuis 66 ans, les Mineurs condamnés en 1949 (il n’en reste plus que 7 aujourd’hui), se battent pour faire reconnaître l’injustice de leur licenciement. Jusqu’en 1981, ce fut un combat dans l’ombre qui n’intéressait personne si ce n’est les intéressés eux-mêmes et leur syndicat.

Dès l’élection de François MITTERRAND à la présidence de la République, les Mineurs reprennent espoir mais ils seront vite déçus. Les Ministres socialistes ̎se filent et se refilent ̎ce dossier d’un autre âge mais qui sent encore la poudre plus de trente ans après. Peuvent-ils ouvertement critiquer les décisions de leurs ainés de la SFIO dont certains sont encore vivants ?

Malgré les hésitations du Gouvernement, les Mineurs obtiennent quand même en 1981 que soit votée par le Parlement la loi d’amnistie pour les syndicalistes accusés d’avoir appelé à la grève. Les intéressés continuent la lutte judiciaire afin d’obtenir une compensation financière pour leur licenciement abusif mais pour le grand public, le dossier repart aux oubliettes.

En 1982, les Généraux factieux de l’OAS qui ont organisé de multiples attentats sanglants contre l’État français sont, eux, réhabilités et réintégrés dans leur grade, ce qui leur permet de toucher une retraite confortable. Les Mineurs Résistants communistes qui ont simplement appelé à la grève en 1948, qui ont perdu leur travail et qui ont été dégradés crient au scandale.

En fait, les différents Dirigeants socialistes qui ont été contactés entre 1981 et 1993 par de multiples courriers au fil des années craignent que l’indemnisation coûte très cher à l’État. Le temps fera son œuvre : plus on fera traîner le dossier et moins la facture à payer sera importante. C’est un bon calcul car, au début des années 1990, la plupart des Mineurs condamnés approche ou dépasse les 70 ans.

En 1992, Pierre BÉRÉGOVOY, alors Premier Ministre, décide de créer un groupe interministériel pour s’occuper du dossier… mais celui-ci ne se réunira jamais et c’est un retour forcé à la case ̎départ ̎.

Il faudra attendre 2004 pour que le Ministre de l’Intérieur, un certain Nicolas SARKOZY, accorde aux 17 Mineurs restants (le temps a fait son œuvre…), une indemnité de logement et de chauffage de 14550 € ; c’est une goutte d’eau par rapport au préjudice subi mais c’est mieux que rien…

En 2005, l’un d’entre eux, Georges CARBONNIER, soutenu par la Haute Autorité de la lutte contre les discriminations veut relancer le combat judiciaire et rencontre Me Tiennot GRUMBACH, un avocat militant de 66 ans spécialiste des affaires concernant les salariés et les syndicats victimes d’injustices graves.

En 2006, Georges CARBONNIER décède et c’est son ami Norbert GILMEZ, 84 ans, qui reprend le flambeau.

En 2008, Charbonnages de France est dissous.

En 2009, le Conseil des Prud’hommes de NANTERRE déboute les Mineurs conduits par Norbert GILDEZ qui demandait des dommages et intérêts pour leur licenciement qu’il estime à environ 600000 €/mineur.

En 2011, la Cour d’Appel de VERSAILLES redonne raison aux Mineurs mais n’accorde que 30000 € à chacun d’entre eux, la somme leur est versée. Christine LAGARDE, Ministre de l’Economie et des Finances du Gouvernement FILLON, fait aussitôt appel de la décision.

En 2012, Christine LAGARDE n’est plus Ministre mais la Cour de Cassation lui donne raison, ce qui veut dire que les Mineurs doivent rendre l’argent. Son successeur socialiste, Pierre MOSCOVICI, ne souhaite pas le remboursement. Christiane TAUBIRA, Ministre de la Justice, vient plusieurs fois à GRENAY en 2014, 2015 et 2016 pour confirmer la non restitution de l’argent et pour soutenir les Mineurs en leur promettant de faire inscrire leur combat dans les livres d’histoire. En 2016, Norbert GILDEZ (92 ans) et ses amis continuent le combat pour l’annulation des sanctions militaires et le rétablissement des mois perdus pour le calcul des divers droits à la pension. Le temps continue son œuvre, il n’y aura bientôt plus de problème financier 1948 !

Norbert GILDEZ, Christiane TAUBIRA et Christian CHAMPIRÉ (Maire
communiste de GRENAY) en 2014 à GRENAY. Photo Voix du Nord

Georges TYRAKOWSKI pour l'APPHIM

Bibliographie :

  • ‘’Ma vie à Liévin‘’, Jules GRARE, 1977, Imprimerie Artésienne LIÉVIN.

  • ‘’Mineur de fond’’, Augustin VISEUX, 1992, Éditions Terre Humaine.

  • ‘’La grande épopée des Mineurs’’, Kléber DEBERLES, 1992, Éditions la Voix du Nord.

  • ‘’Plus noir dans la nuit’’, Dominique SIMONNOT, 2014, Éditions Calmann-Lévy.

  • ‘’Le peuple de la nuit’’, Diana COOPER-RICHET, 2011, Éditions Tempus.

Articles de presse :

  • ‘’Les Gueules Noires veulent laver leur honneur’’, Claire LEFEBVRE, La Voix du Nord du 4 avril 2014.

  • ‘’Mineurs grévistes de 1948 : après la lutte judiciaire, le travail de mémoire’’, Pauline DROUET, La Voix du Nord du 21 janvier 2016.

  • ‘’ Les vies brisées des Mineurs de 1948 au grand jour’’, Haydée SABERAN, Libération du 24 juillet 2014.

Articles internet :

  • ‘’Plan MARSHALL’’, Wikipédia.

  • ‘’Jules MOCH’’, Charles REICH, judaisme.sdv.fr

  • ‘’1947-1950 : violence d’État et social-démocratie’’, Blog ‘’Communards Toujours’’ du Réveil communiste.

  • ‘’ Mineurs de 1948 : C’est une première étape’’, l’Humanité.fr

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Date de création : 03/02/2016 15:51
Catégorie : Social - Les grèves
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Réactions à cet article

Réaction n°3 

par Gand_Georges le 13/08/2021 11:45

Bonjour,

Un peu après 1946, mon père, son épouse et moi-même, alors âgé de 3-4 ans avions quitté notre Normandie natale pour rejoindre la cité de baraquements du Rutoir à Vermelles. De maçon, mon père était devenu mineur de fond, à la fosse 3. Mais après un début sans problème, cela se déroula mal pour la petite famille Gand car à un certain moment, mon père ne travailla plus. On nous coupa l'électricité et faute de salaire, je suppose, la misère s'installa. Nous ne mangions plus que des tartines de pain sur lesquelles ma mère étalait du saindoux ou de la moutarde. Quelques photos prises par le voisin montrent que nous sommes en guenille. Pour arranger la situation, ma mère, atteinte de la tuberculose fut admise à l'hôpital de Lens en novembre 1951 et y mourut en mai 52. Mon père était sans moyen et nous revînmes pédibus via Paris dans le Perche.

A 78 ans, il est temps de raconter cette épisode de notre vie dans la cité minière du Rutoir.  J'ai beaucoup avancé le travail mais il me manquait des repères chronologiques pour situer mes images mémorielles. C'est chose faite, maintenant après avoir lu cet excellent article sur les grèves de 1948. Toutes mes félicitations aux auteurs et j'adresse mon profond respect aux mineurs qui furent traités comme des chiens par ce gouvernement exécrable qui, via la troupe et les CRS, n'hésita pas à réprimer le juste combat des mineurs. J'ai d'ailleurs assisté à une de ces échauffourées dans la fosse 3 de Vermelles. J'en ai une image très nette de ce combat entre des hommes casqués et d'autres qui leur lancaient des projectiles provenant de wagons.

La petite famille Gand a donc été, la victime collatérale de ces décisions gouvernementales honteuses. J'attends avec impatience de lire la fiche de mon père mineur à la fosse 3. On verra les raisons de son licenciement....

Encore un  très grand merci pour cette narration si précise et émouvante. .

Cordialement

Georges Gand  


Réaction n°2 

par Barbieux le 18/01/2017 14:48
Bonjour,
Félicitations. Très beau résumé de la conférence.
Petite anecdote : les enfants de mineurs ne sont pas partis que dans la région parisienne. Un tirage au sort a eu lieu dans la mine de mon grand père et ma mère est partie en Suède avec d'autres enfants pour quelques mois. Je ne sais pas si d'autres enfants sont allés dans d'autres pays mais je n'ai jamais rien trouvé sur internet à ce propos.
Cordialement.

Réaction n°1 

par vasseur le 03/12/2016 16:09
Je vous remercie pour cette communication qui m'aura permis de mieux appréhender cette période de l'histoire des mineurs.
Mon grand-père fut l'un de ceux qui injustement licenciés perdit tout espoir de réhabilitation.En qualité de délégué mineur il n'avait pas ménagé sa peine pour aider ses camarades mais il ne connut pas la même chance lorsque lui et sa famille se trouvèrent dans le besoin.
Je me rappelle que malgré la souffrance et les brimades (il utilisait souvent ce terme), il n'a jamais perdu l'espoir de connaître un monde meilleur attaché qu'il était au principe de fraternité.
Il décèdera en 1995 des suites de cette horrible maladie qu'est la silicose et ce qui me reste c'est le souvenir d'un grand-père généreux toujours prêt à se dresser contre l'injustice.