Trop pressé!
Trop pressé !
A la fin des années 50, j’étais mineur de fond à la Fosse 2 d’Oignies, j’avais à peine une vingtaine d’années. J’occupais, le jour de ma mésaventure, le poste de garde-motrice d’un convoyeur à bande dans la voie de base de la taille Valentine.
Le poste de travail s’était déroulé sans incident. Nous arrêtâmes le convoyeur. Il était temps de regagner l’accrochage au fond et retrouver la lumière mais surtout son foyer.
Pour la remonte, la règle était très simple : premier arrivé, premier sorti ! Mais à la mine rien n’était simple. La plupart du temps nous travaillions à des centaines voire des kilomètres de la précieuse cage. Il fallait quitter les obscurs chantiers à pied puis utiliser différents moyens de locomotion comme des locotracteurs, les télésièges APOD …
Le trajet prenait déjà, parfois, une bonne heure. Arrivés au pied de la cage, il fallait encore attendre son tour pour la prendre. 10, 20 minutes d’attente …
La tentation était donc grande de se hâter et surtout de prendre des raccourcis en traversant les chantiers. C’est bien sûr formellement interdit mais l’appel du jour est bien plus fort. Il me vint l’idée saugrenue de ne pas faire le trajet normal du retour mais d'emprunter un montage. Celui-ci avait une hauteur de 40 à 50 cm. Cette faible ouverture ne me faisait pas peur, c’était largement suffisant pour faire passer le jeune mineur que j’étais. Ce montage servait de retour d'air, il était interdit d’accès au personnel mais c’était un beau raccourci.
Se déplacer à plat-ventre, en tenant sa lampe au début du XXème siècle
Malheureusement, à mi-chemin me voilà coincé ! L'accu de ma lampe et une billette du boisage s’étaient rencontrés et ne voulaient plus se quitter. Impossible d’avancer ou reculer. Les minutes étaient longues, j’ai tout essayé. La libération ne venait pas mais l’angoisse m’envahissait ! D’une part j’étais en infraction et je risquais au minimum une belle amende. Si tous les copains remontaient avant moi, ma lampe serait manquante sur le banc de charge. Bien sûr, quelqu’un viendrait me chercher mais à l’endroit où j’étais, pas sûr qu’il me trouve rapidement.
Mineurs en taille (1 m) au début du XXème siècle
Heureusement, après maintes contorsions j’ai réussi à me dégager et enfin sortir de cette situation dont je n'étais pas fier du tout (la peur commençait à faire place à l’angoisse). J’ai réussi à prendre la cage et personne ne l’a jamais su. La leçon fut bonne et j’ai appris à suivre les consignes de sécurité et d'interdiction.
Pas facile d'avancer surtout si l'accu coince ...
Gérard Bustin, ancien mineur-JLH